CHWICHIYA 002

Chwichiya 002 (et ses appariées) est une météorite trouvée en 2018 et elle est unique.

Lorsque les astéroïdes errent dans l'espace, beaucoup de choses leur arrivent. Ils peuvent s'entrechoquer, être fondus ou même être réduits en poudre. Le matériau peut aussi être altéré par l'eau ou la chaleur pendant des millions ou des milliards d’années. En conséquence, la plupart des météorites que nous récupérons sur Terre ont une longue histoire à raconter. Les chondrites de type 6, par exemple, racontent une histoire de chauffage jusqu'à ce que la plupart de leurs chondres aient été réduits en un amas serré de grains minéraux associés sans bords définis, et que la matrice soit un matériau recristallisé. Les chondrites ordinaires de type 7 sont encore plus altérées avec si peu de nature chondritique de base que seule la chimie les empêche d'être appelées des achondrites. Mais si vous allez dans l'autre sens et regardez les chondrites ordinaires de type 5, vous verrez que les chondres ne sont pas si terriblement perturbés et conservent quelque peu leur forme initiale. Ils peuvent juste parfois montrer des contours flous. Les chondrites de type 4 seront encore mieux conservées avec des chondres abondants facilement visibles à l'oeil nu ou à la binoculaire. Ils peuvent même être bien définis. Le type 3 est l'extrémité la moins altérée du spectre de la chondrite ordinaire. Et au fil des dernières décennies, c'est devenu une classification qui s'est énormément affinée.

Les distinctions décimales sont apparues lorsque des différences subtiles ont été observées dans les pierres. L'une pouvait être légèrement moins altérée par la chaleur tandis qu'une autre avait moins d'altération aqueuse. Il semble qu'il y ait sans cesse une quête pour trouver la météorite la moins altérée. La fameuse « pierre manquante » qui serait restée la plus inchangée depuis le début du système solaire.

Ainsi, des subdivisions de pierres de type 3 sont apparues : 3.8, 3.6, 3.5, 3.4, etc. Nous avons commencé à voir des météorites comme l’abondante NWA869 qui étaient tellement mélangées avec différents matériaux qu'elles ont reçu des classifications telle que L3.8-6. Nous avons vu aussi R3.9 lorsque cette tendance s'est emparée des Rumurutis. Et d'autres familles de chondrites se sont retrouvées également impliquées, telles que les météorites à enstatite E.

Et la recherche continue à chaque instant dans les laboratoires d’analyse pour trouver cette pierre parfaitement conservée. Et c’est dès le début des années 80 que certaines météorites ont commencé à être classées en 3.2. Souvent, il s'agissait de matériaux trouvés en Antarctique. Certaines étaient des météorites provenant des sites Asuka ou Lewis Cliff. Plusieurs trouvailles durant ces années de chasse dans le désert glacé étaient des L3.2. En 1988, les météorites L3.1 ont commencé à apparaître plus fréquemment. Encore une fois, certains venaient d’Asuka ou de Lewis Cliff. Peu de temps après, la météorite Asuka 881244 a été classée L3.0 ainsi qu'une chondrite de Lewis Cliff. Puis, quelques météorites H3.0 sont également apparues dans les publications.

Par la suite, la classification de type 3 a été encore compliquée par des désignations de matériaux mixtes telles que L/LL3 et L(LL)3 et L/H3 qui sont chacune apparues à différentes époques. Nous avons vu de plus en plus de chondrites ordinaires être récupérées aux 4 coins du monde et le nombre de météorites classées a grimpé en flèche. Bien que la désignation L3.0 ait été officiellement utilisée à quelques reprises, il y avait désormais un équipement à la pointe de la technologie et les compétences nécessaires pour une étude si subtile des pierres qu'un deuxième point décimal a pu être ajouté pour laisser de la place entre 3,0 et 3,1. Ainsi, il est aujourd’hui possible de classer en « 3.04 » et « 3.06 » pour distinguer les chondrites ordinaires les plus primitives.

Et puis il y a eu l’histoire de la météorite Semarkona. Elle a été classée dès sa chute en 1940 en Inde. Elle fut d’abord répertoriée comme LL3. C'est une météorite très primitive inondée de chondres spectaculaires. En 2006, elle a été reclassée en utilisant les nouvelles désignations et distinctions subtiles en tant que Type LL3.0. La classification dans le Metbull a été une nouvelle fois modifiée en 2007 pour refléter la nouvelle désignation en LL3.00. Semarkona est depuis devenue la pierre de référence des météorites non altérées, à la fois des chondrites ordinaires et d'autres types de pierres.

Revenons à Chwichiya 002. Il s'agit d'une chondrite carbonée non groupée mais qui a été comparée lors de son analyse à Semarkona, du moins en ce qui concerne la façon dont elle avait été chauffée.

Chwichiya 002 a été récupérée dans le Sahara Occidental en 2018 sous forme de petites pierres et fragments avec un intérieur noir et des chondres abondants, mais très petits. La météorite est très friable et alvéolée de fractures et se coupe aussi facilement qu’un morceau de charbon de bois.

Il n'y a que deux météorites appariées qui complètent cette chute. Il s'agit de NWA11750 trouvée dès 2016 avec un poids total connu de 8,5 grammes, et NWA12957 trouvée en 2018, 43 grammes en poids total. Chwichiya 002 trouvée en 2018 également, avec 779 grammes de poids total, représente la masse principale.

Chacune de ces trois météorites a été classée en utilisant Semarkona comme référence pour l'altération thermique. On a ainsi montré que les trois avaient une faible altération thermique, bien inférieure à la chondrite ordinaire Semarkona qui est déjà la moins altérée par la chaleur !

Cela implique que cette météorite tombée au Maroc a été épargnée durant sa vie dans l'espace de tout événement qui aurait réchauffé la roche. De plus, Chwichiya 002 n'a subi aucune collision, aucune rencontre rapprochée avec le Soleil, aucune chaleur élevée due à la désintégration radioactive comme on en trouve dans les roches profondes de la Terre. La petite roche a simplement dérivé sans souci pendant très longtemps, loin du Soleil. Elle nous vient directement des confins du système solaire, sans doute à cause d'une perturbation gravitationnelle.

Les chondrites carbonées ont souvent des numéros de type 1 et 2 dans leur classification car ce sont des météorites ayant subie une altération aqueuse. Et les types 1 et 2 reflètent ce degré d'altération aqueuse. L'altération aqueuse se produit à des températures basses, bien inférieures aux niveaux de métamorphisme thermique observés dans les chondrites ordinaires. À l'heure actuelle, seules des chondrites carbonées ont reçu des numéros de type inférieurs à 3.

Chwichiya 002 est donc classée en carbonée C3.00 ce qui en fait un objet céleste rare et unique.

Enfin, la météorite Chwichiya 002 semble assez lourde pour une chondrite carbonée. C’est parce qu’elle a une teneur importante en Fe qui se voit dans la pierre sous forme de métal libre rare, de troïlite et de magnétite. Il y a aussi ce qui semble être de minuscules CAI. Les chondres sont très beaux sur les tranches polies, comme on peut s'y attendre avec un type « 3.00 ».

INFO MARS 2022 : Les laboratoires du Dept. of Earth & Space Sciences, University of Washington, Seattle, WA, USA (irvingaj@uw.edu); CNRS, Aix-Marseille Université, IRD, INRAE, CEREGE, Aix-en-Provence, France; Institute of Meteoritics, University of New Mexico, Albuquerque, NM, USA; 4Dept. of Earth & Planetary Sciences, Washington University, St. Louis, MO, USA, ont déterminé une nouvelle classe de météorites carbonées.

Cette nouvelle classe de météorite est appelée CT3.
Chwichiya 002 en fera partie avec Telakoast 001, Cimarron, NWA 6862, NWA 8781 (found near Foum Zguid, Morocco), NWA 12416, NWA 12957, NWA 13671, NWA 13984, NWA 14051, NWA 14139, NWA 14179, NWA 14200.

http://www.meteoritestudies.com/protected_CHWICHIY.HTM

https://www.hou.usra.edu/meetings/lpsc2022/pdf/2046.pdf

 

Mon spécimen de CHWICHIYA 002 de 13,3 g (voir page 24) :

L'appariée NWA 12957 (voir page 19) :